Mai 2023. Crise démocratique? Probablement pas.
Urgence démocratique? Surement.
Pour de nouvelles assises du
socialisme.
Le conseil constitutionnel a validé la mesure d'âge, de la loi "retraites". Elle a été promulguée sur le
champ. Qu'en penser?
Une partie de la gauche s'en prend au conseil constitutionnel lui même, dénonce quasiment la dictature en France, conteste l'heure de
promulgation, et prédit, parfois souhaite des réactions virulentes. Faute politique qui fera le jeu du FN. Ce dernier, en retrait, continue à attendre, les élections. Les
événements, aux marges de l'intersyndicale le mettent en bonne position dans les sondages.Comment ne pas voir, que la
crainte de violences est le meilleur tremplin, pour les partis de "l'ordre" quels qu'ils soient?
Crise démocratique? Probablement pas.
Il y a crise démocratique, si on considère que Président et Gouvernement étaient dans l'illégalité. C'est faux. Le chemin démocratique était sinueux mais légal. Faisons
attention aux mots. Affirmer qu'on serait en dictature, légitime par avance des actions violentes. Comment se fait il que ce moment de luttes sociales soit considéré parfois,
comme une lutte contre un totalitarisme? C'est ce qu'indique Raphaël Enthoven: "La question n'est pas de savoir si la France est devenue une dictature (ce qui n'a aucun sens), mais à quoi tient
l'envie de le croire. A quel désarroi correspond le fantasme qu'en luttant contre la réforme des retraites, c'est le totalitarisme qu'on est en train de combattre?”. Ce désarroi bien
réel, conduit à une radicalisation entretenue par la "FI" qui, de toute force, tient à faire rentrer le mouvement actuel, dans un romantisme révolutionnaire qui ne peut que faire le jeu du
FN.
Urgence démocratique? Surement.
Dans cette situation affirmons qu'il y a urgence démocratique. Pour le moment une seule alternative est crédible et c'est le RN. Droite et gauche de gouvernement se
trouvent marginalisées.
La seule voie pour éviter la catastrophe démocratique c'est de se situer du côté de l'intersyndicale et de condamner clairement radicalités ou actes
irresponsables malgré les provocations policières perçues ici ou là. L'action non violente peut avoir des formes multiples, et les objectifs doivent être adaptés à la
nouvelle situation crée par la décision du conseil constitutionnel, pour ce qui concerne l'intersyndicale.
Maintenir et amplifier le rapport de forces
Il y a un rapport de force à maintenir, élevé, d'où l'appel pressant à se mobiliser au 1er Mai. Ainsi Yvan Ricordeau chargé des retraites à la CFDT affirme: " Il
s’agit d’exprimer une nouvelle fois le rejet de cette réforme et de maintenir un rapport de force avec l’exécutif... il faudra ensuite peser dans la rédaction des décrets." J'ajoute que
l'intersyndicale serait bien inspirée de maintenir son unité au delà du 1er Mai.
Les ouvriers employés de la première et deuxième ligne pendant le COVID n'en peuvent plus face à leur précarité et devant l'arrogance méprisante des classes dirigeantes. Il
en faudra d'autres manifestations en Mai, pour salaires et conditions de travail, et aussi pour réajuster la loi inique sur les retraites.
Pour un accord intersyndical actualisé
Parions sur un accord intersyndical qui persiste, pour des revendications unitaires simples, et un nouveau "Grenelle du travail en juin" avec:
- Une augmentation générale des salaires substantielle, non en pourcentages mais en valeur absolue pour en finir avec ces
revalorisations qui renforcent les inégalités.(Position traditionnelle de la CFDT)
- Des conditions de travail améliorées sous le contrôle d'accords de branches et d'entreprises.
- Un départ à la retraite anticipé, selon des critères de pénibilité redéfinis.
- La protection du travail des plus de 50ans dans le cadre d'accords locaux
- Une clause de revoyure pour la retraite à 64a ou 62a avancée à 2026 et liée aux déficits constatés.
Et... une nouvelle offre politique à gauche
Cette dynamique syndicale devra s'accompagner d'une nouvelle offre politique à gauche. Le populisme NUPES, c'est du perdant. Il a fait son temps. S'il persistait ce
serait un boulevard pour le RN. Les élections de l'Ariège ont montré la voie.
Au fur et à mesure que la FI s'assèche, on en voit les prémices, il convient qu'une gauche réformiste monte en
puissance, on en voit les signaux.
C'est F Roussel qui prend ses distances, la "Convention" de B Cazeneuve qui démarre, le mouvement de Joffrin qui renait avec le LJ. Tout cela devra déboucher sur de nouvelles Assises du socialisme.
Il y a 50 ans, les 12et 13 octobre 1974 eurent lieu dans des conditions autrement plus favorables des Assises du socialisme*. C'était
après la courte défaite de F Miterrand en mai. Il y avait à l'époque une incarnation à gauche. Elle manque aujourd'hui. Il convient de la faire émerger. Je ne crois pas à des solutions
autour ceux qui avaient des responsabilités sous F Hollande. Il faut un regard nouveau, mais d'expérience, et près du terrain. Je pense au Maire de Rouen. Il y en a d'autres. Pourquoi pas
Laurent Berger?
Les conditions d'une émergence de la gauche, sont loin d'être réunies. Mais c'est la seule voie. L Berger l'a compris
en participant au chantier d'un nouveau mouvement, il y a quelques jours, avec les organisations signataires du "Pacte" du "Pouvoir de vivre".
"Pouvoir de vivre", c'est bien notre nouvelle frontière.
Jean
Claude Hiquet 16-04-2023
* Les Assises du
socialisme se tiennent à Paris, les 12 et 13 Octobre 1974
Leur réussite permet l'entrée au PS, de nombreux militants de la direction du Parti socialiste unifié
comme Michel Rocard et Robert Chapuis, du syndicat CFDT comme Jacques Chérèque et Pierre Héritier, et de militants divers (Vie nouvelle, Groupes d'action municipale, Objectif socialiste,
etc.)1.
Après le rassemblement réussi au Congrès d'Épinay, les Assises poursuivent le mouvement d'unification de
la diversité socialiste.
La première journée des Assises est présidée par André Jeanson, ancien président de la CFDT et cofondateur d'Objectif socialiste avec Robert Buron. La seconde a pour président l'écrivain Régis
Debray.